2-28  (1月28日)
   Victorieuse en sa robe voilière, elle allait dans la rue, blanche nef de jeunesse, allait à larges foulées et souriait, consciente de sa nudité sous la toile fine, sa nudité que la brise caressait de fraîcheurs. Je suis belle, sachez-le, vous tous que je ne regarde pas, sachez-le, et regardez une femme heureuse. Haute, elle allait, glorieusement à la main l'horaire sur lequel, s'arrêtant parfois, elle suivait la marche du train qui le lui amenait. Ô merveille d'aimer, ô merveille de vivre.
   Elle s'arrêta, prise de colère contre un chat qui traversait la chaussée si près d'une auto et qui se ferait écraser un de ces jours, le petit imbécile ! Elle aussi, attention aux autos, ne pas mourir aujourd'hui, ne pas se faire abîmer. Aujourd'hui elle était précieuse. Ô ce soir ! Elle reprit sa marche, fonça sur le trottoir. Les deux hommes qu'elle heurta se retournèrent, charmés, mais elle était déjà loin. Elle en cogna un troisième, et parce qu'il lui sourit elle comprit qu'il savait qu'elle était heureuse, allant vers un aimé à nul autre pareil.
   Un nuage là-haut. Si pluie ce soir, ils ne pourraient pas se promener dans le jardin, la main dans la main. Seigneur, j'y tiens beaucoup, fais qu'il fasse beau ce soir. Il me faut un ciel exténué d'étoiles. Lui offrir du thé ce soir, pas des boissons vicieuses, du thé comme à un frère revenu de voyage, du très bon Ceylan à pointes blanches. Non, ce nuage, bébé blanc et rose, est inoffensif. Petit nuage, sois sage, ne grandis pas, je t'en prie.

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